mardi, juillet 15, 2008

LETTRE OUVERTE AUX BRETONS ET AUX CORSES A L'OCCASION DE LA CRISE BELGE

En Bretagne, beaucoup s'inquiètent pour la survie de la langue bretonne. Ma grand-mère ne parlait que le breton (même si elle faisait un effort pour comprendre son petit-fils qui lui parlait en français), ma mère parlait le français et le breton, et moi, à part kenavo ou mandoué benediet, je pense, je rêve, j'écris et je m'exprime en français. A l'école primaire, comme vous le savez, on interdisait purement et simplement le breton dans les salles de classe, et dans les cours de récréation. Je signale que ma mère et ma grand-mère trouvaient ça normal, le français était la marque d'une avancée sociale, une promotion vers la ville où le breton n'avait pas droit de cité. En ce temps-là, Paris éclairait la France et le monde. Avant de mourir, mon père (que je n'ai pas connu) et qui était venu du Liban en 1900, conseilla vivement à sa femme, une bretonne qu'il savait attachée à son "pays" et à sa mère : "surtout, pour les enfants, ne retourne pas en Bretagne", une région qu'il adorait pourtant. La France, avec sa langue extraordinaire, était devenue sa patrie. L'historien lorrain, Fernand Braudel, l'auteur de La Méditerranée, n'a-t-il pas dit que "la langue française est notre patrie" ?
Ceux qui parlent encore le breton souhaitent défendre et protéger une langue qui leur paraît menacée de disparition. Il s'est trouvé à l'Assemblée Nationale une majorité en faveur d'une modification de l'article 1 de la Constitution, favorable à leur voeu. Les sénateurs ne les ont pas suivis. L'un d'entre eux, le sénateur socialiste, Luc Mélenchon, a parfaitement expliqué pourquoi il ne souhaitait pas cette modification de l'article 1 qui fait de la langue française la langue de la République.
En réalité, nous savons que c'est la langue française qui est menacée ! Partout, elle régresse, même au Liban, francophile et francophone, où l'anglais se répand là comme ailleurs. Au Canada, les francophones se battent pour maintenir le français face à l'anglais. Le prochain Sommet de la Francophonie se tiendra d'ailleurs au Canada en octobre prochain. C'est donc avec les Canadiens francophones et les Wallons en Belgique qu'il faut mener bataille en faveur de notre langue. Avec ces deux pays en recherche d'avenir (tout comme nous) une formidable occasion historique se présente aux partisans de la langue française ainsi qu'aux partisans des langues régionales. Ne ratons pas ce rendez-vous avec l'histoire.
Depuis des années, devant le recul du français, je préconise la création de ce que j'appelle les Nouveaux États-Unis Francophones (les NEUF). Par chance, nous pouvons entreprendre cette construction à dimension planétaire dès maintenant, avec tous les francophones qui sont juridiquement dans la mouvance française, à savoir les Départements et Territoires d'outre-mer (Martinique, Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Tahiti, Nouvelle-Calédonie, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon) ainsi que la Corse, qu'il nous faut considérer comme un Département d'Outre-Mer, tous promus au rang d'États souverains associés dans la Confédération des NEUF, dont le français sera la langue de communication, à l'intérieur comme à l'extérieur. Pour que les langues dites régionales ou minoritaires bénéficient d'une réelle protection, je propose que la rédaction de la Constitution régissant les États-Unis Francophones soit confiée aux Corses ( qui sont d'excellents juristes) parce que ceux-ci auront naturellement à coeur de promouvoir leur propre langue dans la Constitution. Ainsi toutes les autres langues pratiquées au sein des Nouveaux États-Unis Francophones seront-elles reconnues et protégées. Les Bretons, avec d'autres (pourquoi pas le Conseil Régional de Bretagne ?) pourraient d'ailleurs participer à la rédaction de ce qui pourrait être le préambule de la Constitution.
Je le dis sans forfanterie, c'est la seule alternative possible, à la fois crédible et réaliste, face à la mondialisation qui déferle à la vitesse du vent, et qui démolit tous nos acquis sociaux des 19e et 20e siècles sur lesquels reposait notre bien-être. La "construction" de l'Europe, conçue dans les années 50, nous a conduit dans une impasse, et s'avère être une nouvelle ligne Maginot. Plus grave encore, le monde n'est plus qu'un village où tous les peuples sans exception prennent leur place. Les Blancs ne sont plus aujourd'hui qu'une minorité, et les Autres seront de plus en plus majoritaires : le destin de l'humanité n'appartient plus aux seuls Blancs. La formidable émergence de l'Asie a fait basculer l'axe du développement historique vers le Pacifique. L'Afrique elle-même subit cet effet de bascule. La nouvelle civilisation planétaire sera "multicolore". Enserrés entre les deux Super-Grands de l'époque, les partisans de l'Europe ne pouvaient pas le prévoir. Ils avaient peur du "communisme", et ne concevaient qu'une petite Europe protégée par les États-Unis d'Amérique. Le "communisme" et son produit étatique, l'URSS, a disparu ! Nous voici au seuil de ce que d'aucuns appellent le "choc des civilisations", ce qui revient à dire que la guerre mondiale, qui a commencé à la fin du 19e siècle par la destruction de l'Empire ottoman (la route de l'Asie !) risque de connaître un nouvel épisode, plus effroyable encore que les deux précédents puisque cet épisode se manifestera par un conflit total, à la fois économique, financier, racial, religieux et probablement atomique - dont les deux grandes puissances, la Chine et les USA, seront les initiateurs ! Si nous voulons l'éviter, il faut mettre en place de vastes ensembles culturels qui imposeront la coexistence pacifique sur la terre entière. Ces ensembles, tout naturellement, se construiront par la communication autour de l'appartenance culturo-linguistique (francophone, anglophone, hispanophone, germanophone, russophone, arabophone etc.), ces différents ensembles s'intégrant dans une toile à l'échelle de la planète où les différents segments culturels, reliés les uns aux autres, finiront par générer une citoyenneté mondiale.
Ainsi, grâce à la diversité des territoires francophones, nous pouvons d'ores et déjà créer un assemblage Nord-Sud associant des communautés de toutes origines, et construire ensemble une société plus soucieuse de progrès social, par une compétition pacifique avec les autres communautés composant l'humanité.
La "crise" belge, désormais insoluble dans le statu quo, les aspirations des Francophones d'Amérique du Nord (Canada,USA,Antilles...) et d'ailleurs, nous obligent à faire des propositions qui concerneront tous les francophones du monde, tous étant appelés à nous rejoindre ultérieurement d'une manière ou d'une autre, mais toujours à l'issue de consultations démocratiques, l'ensemble accouchant d'un "citoyen du monde", disposant d'une carte d'identité "francophone". La chance de la France, et des Francophones, je le répète, c'est leur dispersion à travers le monde, qu'un marché commun doit souder sur le plan économique. Ce Marché Commun Francophone sera naturellement relié aux autres Marchés, et d'abord au Marché Commun européen, et à celui qui verra peut-être le jour en Méditerranée.
Comme on le voit, les Bretons, les Corses et les Wallons sont sur le pont ! A eux de hisser la voile des NEUF !



1 commentaire:

Sébastien Strazzer a dit…

Je vois dans la présentation de votre blog que vous prônez la fédération des francophones, ce n'est pas une mauvaise idée. En cas de scission de la Belgique, le rattachement de la Wallonie (avec ou sans Bruxelles) à la France reste un option de choix.
Félicitations pour votre blog :-)

Amicalement,
Sébastien Strazzer
www.frontfrancophone.be

Archives du blog