dimanche, avril 08, 2007

LETTRE OUVERTE A NICOLAS SARKOZY

Monsieur le candidat,

Nous voici à quinze jours à peine du 1er tour, décisif comme on le sait. Avec des millions de Français, je reste indécis, et je suis convaincu que c'est notre choix "final" qui fera la décision. En ce qui me concerne, je me résoudrai à voter "sarkosy" à deux conditions.
La première : je souhaite obtenir de votre part un engagement solennel en faveur de la paix. La France et l'Europe n'ont plus intérêt (ni les moyens) de faire la guerre. Jacques Chirac a eu raison, et vous l'avez d'ailleurs reconnu, de s'opposer à l'expédition anglo-américaine en Irak. Notre mission aujourd'hui consiste à préparer une grande négociation en faveur de la paix, et d'abord au Proche-Orient, où la guerre menace de repartir de plus belle, à tout moment. J'attends donc de vous un engagement pacifique, répudiant toute participation à ce genre d'expéditions, sous quelque prétexte que ce soit.
La seconde : toutes les réformes nécessaires à l'adaptation de notre pays au nouveau monde seront mises en chantier, en concertation avec toutes les organisations représentatives, la proposition résultant de ces travaux devant être approuvée par tous les Français, au moyen du referendum. J'attends donc de vous un engagement démocratique.
Ces deux engagements préserveraient, à mes yeux, l'avenir. Ils suffiraient, par conséquent, pour que je me décide, in fine, à voter pour vous, plutôt que pour les deux autres candidats susceptibles d'être élus, qui sont parfaitement estimables mais qui incarnent, selon moi, le risque d'un retour au passé, l'une s'appuyant sur un "socialisme archaïque", malgré, semble-t-il, son "désir d'en sortir", l'autre sur un parlementarisme désuet qui ne manquerait pas de ressusciter la IVe République baptisée VIe !, d'autant que je crois le moment venu de supprimer le poste de Premier Ministre afin de nous doter d'un véritable régime présidentiel...
Dans l'attente de votre réponse, je vous prie d'agréer, Monsieur le candidat, l'assurance de mes sentiments respectueux.

Gabriel Enkiri, ex-candidat au 1er tour de la Présidentielle.

1 commentaire:

Loïc Decrauze a dit…

Ah ! rasante campagne

Tumultueuse marche vers le premier tour, les parades de la campagne laissent émerger les caractères des prétendants et l’agitation plus ou moins stratégique de leur équipe respective. Les thèmes s’égrènent au fil des urgences artificielles : la frénésie médiatique détermine la hiérarchie du jour.
La plongée dans l’histoire des présidentielles, ou de certaines municipales, provoque une nausée fascinée par les coups sans pitié portés entre adversaires. A visionner quelques documentaires, « Valéry Giscard d’Estaing ou le théâtre du pouvoir », « François Mitterrand : le roman du pouvoir », « Chirac jeune loup et vieux lion », et l’édifiant « Paris à tout prix », on en sort convaincu : meurtre du rival excepté, rien ne différencie les mœurs politiques actuels de ceux des temps antiques.
Abreuvé d’analyses, je tente de surnager face aux multiples positionnements des uns et des autres. L’instinct, le ressenti m’incline à croire à un remake de la version 74. Douze candidats parmi lesquels le Bayrou en phase ascendante.
Alors qu’à droite, hors centre, la bipolarisation s’affirme entre un extrême populiste et une droite marquée (n’oublions pas, avec quelque effort amusé, l’épiphénomène de Villiers), la gauche, elle, n’a tiré strictement aucun enseignement de l’émiettement de 2002 et s’est obscènement assise sur ses promesses d’union suite au front hystérique contre le traité constitutionnel. Pathétique spectacle d’une gauche qui s’octroie le luxe suicidaire de multiples candidatures.
Cela nourrit-il seulement le débat de fond sur la gestion et les réformes nécessaires pour un pays timoré ? La France, pays dont la jeunesse, quarante ans après 68, ne se bouge plus que pour revendiquer toujours plus d’Etat, de sécurité de l’emploi et pour ânonner ses angoisses sur une incertaine retraite.
L’offre politique s’est donc mise à l’aune des desideratas des populations françaises. Chaque chapelle se fait fort de combler les attentes de son public portant des artistes plus ou moins talentueux, mais indubitablement opportunistes.
Que croire : la sérénade révolutionnaire qui veut enfler l’Etat comme aux plus sombres heures du soviétisme ou l’antienne libérale dont la confiance dans les marchés frise avec l’aberration de la génération spontanée. La rapide étude des comportements des financiers, traders et autres boursicoteurs permet de saisir le poids d’un panurgisme délétère, et les vagues d’un irrépressible grégarisme. La simple rumeur dépréciative sur une société peut, par l’effet domino, occasionner une baisse notable du cours en bourse lequel impliquera, parfois sans fondement tangible, une atteinte à l’emploi réel.
A l’occasion des cinquante ans du traité de Rome, aucun des candidats français n’a la crédibilité pour initier une nouvelle impulsion au bourbier à vingt-sept qui a usurpé deux élargissements aux peuples européens avant même d’avoir le fonctionnement institutionnel adapté. Sans aucun doute la pire gourde du Conseil européen, prétendue clef de voûte qui a tout fait capoter.
Cette campagne se pare des quelques sujets nationaux, du bien franco-français, qui irriguent les préoccupations du peuple sans, à aucun moment, qu’un des candidats n’avoue que la destinée de notre pays est majoritairement dépendante de facteurs européens et mondiaux… sauf si nous tenons à prendre comme modèle la Corée du Nord. Un chômage consubstantiel à nos mœurs économico-publics incapables de réformes libératrices et qui donnent encore la prime à la manne étatique qui calfate sans compter. Des fonctionnaires, trop protégés par des décennies de démagogie et de lâcheté politiques, qui n’admettent pas qu’on rogne leurs sacro-saints acquis sociaux, quitte à risquer l’implosion du système. La lubie d’un changement de République (évoqué par les antigaullistes dès l’élection de 1965) qui voudrait doper le Parlement et faire accroire qu’un changement de numéro romain résoudrait le mal français tout comme certains imposteurs ont défendu qu’un rejet de la constitution européenne éviterait la déferlante libérale.
Les discours ne doivent plus leurrer : ils ne servent pas la cause nationale, mais les seules ambitions personnelles. Chacun s’essaye, comme à chaque consultation électorale, au ratissage des voix selon son ancrage.
Paradoxe des postures : les anciens cumulards des candidatures campent le rôle des piques et de la verdeur révolutionnaire : la rupture extrême s’incarne chez les papy Le Pen et mamie Laguiller, alors que les primipares présidentiables sont les mastodontes susceptibles de l’emporter.
Jacques Chirac va donc passer le relais du pouvoir en bien meilleure santé que son admiré prédécesseur. Il pourra ainsi se consacrer à son autre passion, après l’inavouable goût pour la conquête : l’influence humaniste à l’échelle d’une planète toujours plus complexe. L’hommage quasi unanime a ses élans verbaux, sur la scène internationale, à propos des grands sujets de notre « maison [qui] brûle » a tracé sa marque dans l’histoire : la présidence de la parole.
Petit instantané abrupt, sans prétention idéologique, d’une campagne finalement très banale… le résultat le sera-t-il tout autant ?
http://pamphletaire.blogspot.com

Archives du blog