vendredi, avril 11, 2008

MAI 68, UNE ÉNIGME POUR RENÉ RÉMOND ! (2)

Une énigme
Certes, les deux années précédentes ont été politiquement délicates, mais l'économie poursuit sa progression régulière avec des taux de croissance jamais vus. L'inflation est contenue dans des limites inférieures au taux de croissance. Le niveau de vie s'élève, et toutes les catégories en profitent, même si c'est dans des proportions inégales. Le chômage, avec un taux de 1,5%, ne dépasse guère le seuil de ce que les économistes estiment être la marge incompressible et nécessaire à la flexibilité de l'activité. Le franc est apprécié : le contrôle des changes a pu être totalement supprimé en janvier 1967. Le pouvoir est assuré de la stabilité, les institutions paraissent acceptées, le prestige du général de Gaulle reste grand dans l'opinion, même s'il a été atteint auprès des politiques (c'est moi qui souligne en italique) par ses déclarations de politique étrangère. L'opposition, encore minoritaire, se prépare pour des échéances qu'elle sait encore éloignées : la prochaine n'est pas avant 1972 où prendront fin simultanément le mandat présidentiel et la législature de l'Assemblée; d'ici là, pas de surprise prévisible. Le pays est si paisible qu'il advient à des journalistes de craindre que pareille tranquillité n'engendre l'ennui (ici R. Rémond évoque le célèbre article de P. Viansson-Ponté, dans le Monde "La France s'ennuie").
L'irruption soudaine d'une crise d'une exceptionnelle gravité pose dans toute son ampleur la question de l'explication en histoire : comment donc une agitation des plus réduites à son début a-t-elle bien pu se propager comme un feu de brousse et embraser la société tout entière ? Et, pour user d'une autre image, comment le fleuve a-t-il pu ensuite rentrer aussi vite en son lit ? (à suivre)

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